Vit et travaille à Belmont-sur-Lausanne (Suisse)
Expositions personnelles :
Galerie Arts et Lettres, Vevey, 1979, 1984, 1992, 1997, 2001, 2007, 2011
Galerie Ditesheim, Neuchâtel, 1982
Galerie Miedzynarodowej Prasy i Ksàzki, Cracovie (Pologne), 1984
Galerie Edouard Roch, Ballens, 1987, 1990, 2005
Musée Jenisch, Vevey, 1994
Galerie Ligne Treize, Carouge (Genève), 2010
Expositions collectives :
Collection Banque cantonale vaudoise, Lausanne et Vevey, 1985, 1991
Musée des Beaux-Arts, Le Locle, 1987, 1992, 2000
Musée Jenisch, Vevey, exposition « Alice Bailly et ses boursiers », 1996
Galerie Pia-Anna Borner, Lucerne, 1998
Galerie L’Estrée, Ropraz, 1996, 2004
Musée gruérien, Bulle, automne 2000
Hôtel de Ville, Yverdon, « Teinté de mots », automne 2001
Musée Jenisch, Cabinet cantonal des Estampes, Vevey, exposition « Raymond Meyer, un atelier dimpression au jour le jour », 2009
Galerie Edouard Roch, Ballens, "Le chant du Signe" (2011)
Espace Culturel Assens "Rousseau en pays de Vaud" (2012)
Galerie Ligne Treize, Carouge (Genève), 2015
Bourses et prix :
Prix de la Fondation Alice Bailly (1973)
Prix de la Bibliothèque des Arts, Lausanne (1976)
3ème prix de la 1ère triennale de l'estampe originale de la Ville du Locle (1992)
Prix de la Fondation Irène Reymond (1997)
Prix de Belles-Lettres (2002)
Grand Prix de la Fondation vaudoise pour la culture (2006)
Livres (illustration) :
« La Gueule en nage », poèmes André Jaccard, Ed. d’Orzens Lutry (1978)
« Ultramarine », poèmes Olivier Perrelet, Ed. Eliane Vernay Genève (1982)
« La Demeure des heures de peine », poèmes Bruno Ackermann, Ed. Empreintes Lausanne (1985)
« Poèmes de la Tulipe Noire », texte Georges Haldas, Ed. d’Orzens Lutry (1991)
« Saisons de la peine joyeuse », poèmes Ulrike Blatter, Ed. B. Blatter Montreux (1995, 2e état 2007)
« Le chemin de Saint-Jacques de Compostelle : états d’âme d’un pèlerin ordinaire : de Saint-Jean-Pied-de-Port (France) à Santiago de Compostela (Espagne) », texte Bernard Reymond, Les Ed. du Béhaire Lausanne (1997)
« Blancheur dévastée », poèmes Jean-Pierre Vallotton, Ed. d’Orzens Lutry (1998)
« L’amour est l’amour perdu », texte S. Corinna Bille, postface Maurice Chappaz, Ed. d’Orzens Lutry (2000)
« Attente au Bar de l’Amiral : chronique », texte Pierre-Laurent Ellenberger, Ed. d’Orzens Lutry (2003)
« Une certaine Chine », texte François Debluë, Ed. d’Orzens Lutry (2013)
« Poèmes pour Edmée », poèmes Pierrette Micheloud, Ed. d'Orzens Lutry (2015)
Tout le parcours d’Armand C. Desarzens converge vers cette quête d’un centre qui, bien sûr, est centre de soi, mais aussi, simultanément, lieu inaccessible, inexpugnable : lieu qui, à mesure qu’on s’en approche, semble se soustraire à notre saisie en se résorbant sur lui-même. L’expérience de cette quête révèle que ce centre vers lequel nous tendons n’est pas un point fixe, mais un respire qui, continûment et jusqu’à l’infini, se contracte, se dilate, et qui, en raison de cela même, nous demeurera à jamais inaccessible. Avec sa candeur obstinée de pèlerin russe, Armand C. Desarzens s’est engagé depuis longtemps sur ces chemins aux horizons inatteignables. Au moyen de ses étonnantes sculptures tout d’abord : fantastiques constructions aux équilibres précaires, dont les éléments ajourés, coulés dans le bronze et soudés ensemble constituent d’étranges architectures, dans lesquelles les diverses qualités des reflets du métal contrastent avec la pénombre d’intérieurs auxquels nos regards accèdent par des ouvertures sur lesquelles se referment, dans un claquement, quelques portillons mobiles !
Parallèlement, Armand C. Desarzens réalise d’extraordinaires dessins à l’encre noire, rehaussés parfois de couleur. Avec une patience de bénédictin, il trace un fin réseau d’entrelacs, de mailles, d’éléments torsadés ou de vrilles qui, peu à peu, envahissent toute la surface du dessin. Sur ce fond à la trame si dense vibrionnent quelques éléments plus sombres, tantôt lacis sinueux, tantôt ponctuations, tantôt lignes qui délimitent ou articulent des formes géométriques de sphères ou de cubes ajourés. Ces œuvres, dans lesquelles le regard se perd, échappent à la rigidité d’un trait cerne qui enferme et étouffe, en ceci que l’artiste parvient, au moyen des variations infimes de son écriture, à ménager des jeux de valeurs qui créent des lumières et articulent les plans de lecture.
Au fil des ans, son art n’a cessé de se complexifier. En superposant des éléments qu’il découpe au bistouri et rehausse de dessins, il fait de ses œuvres aux espaces labyrinthiques de véritables pièges à regard où se fourvoient nos imaginations, retenues captives. Depuis peu, il introduit dans les marges de ses dessins des éléments qui, s’échappant en toute liberté sur les blancs du pourtour de la composition, ménagent au regard une possibilité de sortie, une échappatoire. C’est peut-être dans un même esprit que l’artiste a placé, dans certains de ses dessins les plus récents une gravure. Magnifiée par les contrastes qui découlent de la mise en regard de la subtilité de la gravure et celui des découpures de dessins aux rehauts de couleurs plus sonores et plus vives, celle-ci devient le cœur palpitant d’une composition dont les ajours et les reliefs du pourtour soulignent la fragilité.
Mais évoquer l’œuvre de Desarzens, c’est immédiatement avoir à l’esprit son œuvre gravé. Encouragé par A.-E. Yersin ce maître du burin qui avait su pressentir très tôt ses aptitudes particulière pour la gravure, Armand se mit à graver. En explorant les diverses potentialités, les multiples possibilités que recèlent les techniques de l’eau-forte aussi bien que celles du burin, il allait peu à peu se doter d’un langage propre. Si, dans un premier temps, il favorisa l’eau-forte, fasciné par la mystérieuse alchimie et les surprises que ménage la morsure du cuivre par l’acide, il n’en privilégia pas moins par la suite le burin qui prend aujourd’hui dans son travail la place essentielle que l’on sait. De par sa nature, cette technique qui consiste à pousser devant soi l’outil qui s’apprête à attaquer la plaque de cuivre, place le buriniste en situation de devoir explorer la surface encore vierge du métal. Comme les empreintes de pas du voyageur se trouvent derrière lui tandis qu’il appréhende le parcours à venir, le burin, laissant derrière lui le tracé du sillon déjà parcouru, trouve toujours devant lui la surface encore vierge de la plaque de cuivre, espace qui invite à la découverte, fait de celui qui pousse son burin un explorateur. C’est cette spécificité, comme aussi la lenteur qu’exige ce travail précis, qui sollicite l’imaginaire. Car, simultanément aux étendues inexplorées et luisantes de la plaque qui s’offre à lui, ce sont les espaces intérieurs qui s’entrouvrent.
On l’aura compris, la nature particulière de cette technique ne pouvait que convenir à Desarzens. Il y a entre le caractère de l’artiste et ce moyen d’expression qui demande patience, méticulosité et maîtrise de soi, une parfaite osmose. Il en résultera une série de gravures d’une incroyable finesse, dans lesquelles l’artiste introduit parfois des textes de ses amis poètes, textes qui l’inspirent et l’habitent durant son travail. Depuis quelques années, son art s’est encore allégé. Nées de la complicité d’un long compagnonnage avec le taille-doucier Raymond Meyer, une série de réflexions et d’essais d’atelier ont conduit les deux comparses à délaisser de plus en plus les accents flatteurs de la couleur au profit d’encres aux tonalités plus subtiles, qui soulignent mieux encore la poésie de ces burins dont le langage ne cesse de s’enrichir et de gagner en plénitude.
Comme ce pèlerin russe auquel nous faisions allusion, Armand C. Desarzens découvre petit à petit que ce temps de la quête d’un but qu’il croyait pouvoir atteindre, que ce centre vers lequel il tendait si fort, c’est aussi bien en lui que hors de lui qu’il se trouve, et ses gravures en témoignent. Il se peut aussi que la grande respiration, qui les habite désormais, soit liée à cette liberté qu’il a conquise sur lui-même ; liberté qui lui a permis d’accéder à cet état de poésie auquel il est maintenant parvenu.
Bernard Blatter
Directeur honoraire du Musée Jenisch